29 oct. 2015

Naissance d'Augustin - Récit en maison de naissance #1 - Le joli témoignage de Marie

Je pense que pour bien choisir, il faut connaître les possibilités qui s'offrent à nous.

Mon métier, depuis quelques mois, c'est aussi d'informer les parents. Leur donner une information la plus complète possible afin qu'ils choisissent ce qui est le mieux pour eux, dans le moment et la situation où ils se trouvent.

Alors, plutôt que de grandes théories et de longs discours, la meilleure façon de te faire découvrir comment et où tu peux accoucher en Belgique, ce sont les témoignages de femmes, de mères, de couples
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Source: Pinterest

Prendre la parole, s'exposer et se raconter dans ce qui est une des situations les plus intimes de sa vie, ça demande de la force et du courage. C'est pourquoi je demande beaucoup de respect aux personnes qui liront ce récit. Tu n'es pas obligé d'être d'accord avec le choix des parents, mais tout commentaire sera fait dans le respect! Un grand merci.
Place au récit de Marie...



La naissance d'Augustin

"Comment avons-nous choisi l’accouchement en maison de naissance ?

18 septembre 2010. Bébé1. Réveillée à 5h du mat’ par d’étranges douleurs au ventre. Et là, « je sais ». De toute façon, les femmes « savent ». C’était la première fois que je ressentais une contraction depuis le début de ma grossesse, mais je sentais que c’était la dernière ligne droite. Je patiente. Après tout, c’est peut-être juste une fois… 5h30, ça continue. Je réveille l’homme : « je crois que ça y est ». Lui, au taquet, prêt dans la seconde (il avait dormi habillé ou quoi ?). Bizarrement, je me sens sereine. Les bagages étaient prêts, il y a 25 minutes de trajet à compter, pas d’eaux coulant le long des cuisses en vue… Les contractions sont espacées, mais régulières. Je prends une douche. C’est dingue cette manie des futures mamans de se doucher quand elles sentent que c’est le jour J !
Bon, presque 7h du mat’, et là je me décide à téléphoner à ma sage-femme. Ah tiens, je ne l’ai pas précisé ? Oui, nous avons décidé que Bébé verrait le jour en maison de naissance ! Rebobinons. (C’est là que j’entends l’homme se marrer : « Rebobiner ? Mais plus personne n’utilise ce mot-là ! ». Bin moi, je vois les choses comme ça : j’appuie sur les deux flèches dirigées vers la gauche et là, ça fait bziouuuuuuuuuuu).

Flashback. En ce temps-là, mon job me faisait rencontrer des tas de femmes indépendantes (au sens du statut social, je veux dire). C’est au gré du hasard (en est-il un ?) que je rencontre Sylvie de Meeûs. Je ne crois pas qu’elle me tiendra rigueur de la citer ! Ce jour-là, je la rencontre par rapport à son activité professionnelle. Mais la discussion dévie sur l’asbl dans laquelle elle est membre : AlterNatives. Et c’est dans CETTE discussion-LA que j’entends parler pour la toute première fois de l’accouchement en maison de naissance. Et ne me demandez pas pourquoi : mon cœur a fait boum. Vous voyez, c’est cette étrange sensation dans le creux du ventre qui vous fait savoir que ça sonne juste pour vous… Le germe est déposé dans ma tête, le processus est enclenché.

Quelques mois plus tard, l’homme et moi ayant abordé le projet « bébé », nous avons décidé de rencontrer des sages-femmes qui travaillent dans une maison de naissance, l’une à Namur, l’autre à La Louvière. « Par curiosité ». J’avoue, l’homme n’était pas plus convaincu que ça par la démarche, mais j’ai l’immense chance qu’il me fasse confiance, et nous voilà à papoter avec une des sages-femmes de Namur. Le courant passe bien, les explications nous satisfont. Autre rendez-vous, nous rencontrons Lucette dans la maison de naissance Clinisoins. Et là, franchement, on est ressortis confiants, soutenus par l’immense expérience de Lucette en matière de naissance. Je ne vous ai pas dit, Lucette approche alors les 80 ans. Même l’homme a plongé complètement dans l’idée de l’accouchement en maison de naissance. Et puis, La Louvière, c’est moins loin pour nous que Namur.


Accoucher en maison de naissance,
loin des chambres d'hopital
Source: accouchementadomicile.be

Le suivi de la grossesse

Quelques semaines plus tard, Bébé1 étant en route, nous prenons rendez-vous avec Lucette. Elle nous accueille avec un « déjà ? » souriant. C’est comme ça qu’a commencé la série de rencontres mensuelles avec notre sage-femme. C’est elle qui s’est chargée du calcul de la date présumée de la naissance, des tests pipi chaque mois, de la vérification de la tension, du rythme cardiaque du bébé, du contrôle de la prise de poids, etc. La gynéco, on ne la rencontre que pour 2 ou 3 échographies le long de la grossesse : 12, 22 et 32 semaines. Le point négatif ? Faut attendre plus longtemps que les autres avant de connaître le sexe du bébé (22 semaines. Quoi, tout ça ? Oui mais là, il suffit de relativiser, avant c’était 9 mois qu’il fallait attendre pour savoir !). Le point positif ? On ne bombarde pas bébé avec des ondes pas super bonnes pour lui. A la fin de la grossesse, les rendez-vous avec la sage-femme passent de mensuels à bimensuels, le suivi est accru.

Et c’est là qu’on revient à mon rebobinage du début de l’article. On en était où ? Ah oui, je me décide à téléphoner à ma sage-femme. C’était un samedi, et il était juste avant 7h du matin. Parce que la sage-femme de la maison de naissance, c’est super dispo, on accouche quand on doit accoucher, et pas juste avant un jour férié, ou juste avant les vacances du gynéco, ou juste avant le début du WE. J’ai rencontré la sage-femme plus de 9 fois, et je sais que c’est elle qui sera là quand Bébé sortira. Pas de surprise, pas d’étudiants qui viennent me regarder « juste pour savoir », pas de surmédicalisation, pas de baxter. Et puis, je n’ai pas coûté cher à la mutuelle. Évidemment, la maison de naissance, c’est près d’un hôpital : le principe, c’est qu’on soit rapidos aux urgences s’il y avait un souci. Et puis, il y a des « règles » : tout accouchement ne peut pas se faire en maison de naissance. Mais je ne rentrerai pas dans les conditions d’accès ici, il y a suffisamment d’info sur la question ailleurs sur la toile. Bref, je me sentais en sécurité dans les mains de Lucette, et rassurée aussi par la proximité avec l’hôpital. Euh, j’ai oublié de préciser que mon cerveau cartésien avait bien sûr épluché les statistiques concernant les accouchements en maison de naissance (taux de problèmes, de mortalité, d’handicap, etc.) et lu et relu des tas d’articles sur les dérives médicales de l’accouchement à l’hôpital. J’avais pris connaissance aussi du fonctionnement hollandais, bien au point concernant les accouchements hors cadre hospitalier.


Bébé arrive

Bon, revenons à Bébé1-prêt-à-sortir. Au téléphone, Lucette me demande la fréquence des contractions, puis nous invite à la rejoindre à la maison de naissance. Le trajet en voiture, dur dur : on découvre la sensation de ces torrides contractions et il faut trouver la force de gérer ça. Arrivée sur place, je me sens plus rassurée. Lucette contrôle ma tension et prend un air satisfait. Au contrôle suivant, ma tension est bonne, elle m’explique alors que ma tension était haute la première fois, mais elle n’a pas manifesté de stress pour ne pas me faire flipper. Bonne initiative, et payante. Vérification du col forcément : et nous recevons la confirmation que le Grand voyage a commencé.
Lucette nous installe dans la première chambre, qu’on avait eue l’occasion de visiter la première fois. Elle sort le réanimateur (oui oui, elle est formée à la réa !). Vous pourriez vous dire qu’à ce moment-là, ça vous fait flipper. Et bien non, au contraire, ça rassure : « Au moins, elle est équipée ». Lucette nous sert le petit déjeuner (enfin, surtout à l’homme, car moi j’ai reçu comme consigne de ne pas trop manger. J’ai eu raison de l’écouter, accoucher ça file des nausées et ça peut faire vomir…) Et là s’ensuit le ballet éprouvant des douleurs. Bin oui, parce qu’en maison de naissance, on le sait d’emblée : pas de péri ! Ça se joue à l’ancienne. 10h de travail. 10 longues heures durant lesquelles je suis libre de bouger, me lever, me coucher. Et puis, j’ai pu plonger dans le bain. Là j’avoue, j’ai eu enfin un répit, la baignoire ça a été LE moment salvateur pour reprendre un peu de souffle. 


Source: www.sage-femme-valaisromand.ch


Ensuite, c’est reparti de plus belle. Je m’étais persuadée que j’accoucherais sur le tabouret, assise, dans ce qui me semblait être la position la plus naturelle. Pourtant, figée par la douleur, je me suis clouée au lit et je n’ai plus voulu le quitter (sauf pour la pause pipi). Lucette est restée près de moi dès le moment où les contractions se sont intensifiées, et elle ne m’a plus quittée. Quelle présence rassurante quand on éprouve pour la première fois des douleurs qui échappent à notre contrôle. Lucette est accompagnée de Stéphanie, sa petite-fille étudiante sage-femme. Stéphanie me dira plus tard « mais tu as souri tout le temps ! ». Comme quoi… Lucette m’a fait chanter des sons graves pour m’aider, m’a guidée, m’a massé le bas du dos pour soulager les contractions. La poche des eaux n’était toujours pas percée, mais elle a tenu à respecter le rythme naturel du corps. Quand enfin le col est complètement dilaté et ma tolérance épuisée, Lucette a percé la poche des eaux. Et là, tout a été très vite.

15h23 : je suis Maman. Le bébé à peine sorti du ventre, Lucette me l’a déposé immédiatement sur le torse. Je découvre cette sensation de bébé gluant et visqueux sous mes mains, tellement gluant que je n’ose pas le soulever pour voir sa bouille. Je suis sous le choc, maquée par les hormones, par la douleur, par la drôle de sensation que ça fait au moment où le bébé passe. Ça y est enfin, ça y est enfin ! Je comprends pourquoi on appelle ce moment « la délivrance ». C’est carrément passer en quelques minutes de ce qu’il y a de pire à ce qu’il y a de mieux dans la vie d’une femme. 


Source: Pinterest


L’homme coupe le cordon. Stéphanie a déposé un essuie chaud sur le corps du bébé. Lucette est présente mais discrète, elle me laisse découvrir mon bébé à mon rythme. C’est mon fils, c’est Augustin. Quand Lucette me sent prête, elle récupère mon enfant pour le peser et le mesurer, puis Papa donne le bain et Stéphanie l’habille. Pendant ce temps, Lucette gère l’expulsion du placenta, vérifie, fait mes soins. Ça s’est un peu déchiré, j’ai poussé trop vite à un moment. Lucette m’avait pourtant guidée, mais c’était plus fort que moi.

Une fois habillé, Augustin est déposé immédiatement au sein. Lucette avait été claire : pro-allaitement, et avec elle, « pas de crevasses ». C’est comme ça qu’a démarré ma longue relation à l’allaitement… Mais ça, c’est une autre histoire !
Une fois le bébé installé au sein, Lucette s’éclipse, nous laisse vivre nos premiers moments avec notre tout petit. Plus tard, elle viendra nous apporter le souper. Elle est disponible, l’interphone est installé dans presque toutes les pièces de sa maison, juste à côté. La nuit s’installe, nous dormons sur place. Le lendemain, après le petit déjeuner et les soins post-partum, nous reprenons le chemin de la maison. Lucette nous avait précisé qu’on pouvait prendre le temps, mais nous avions envie de rentrer. Il était midi quand nous avons franchi les portes de la maison, moi avec quelques kilos de moins que la veille, l’homme avec quelques kilos de plus dans la main…
Bienvenue chez toi, Augustin !


Les soins post-partum à domicile

Bon, j’avoue, j’ai eu droit une bonne dizaine de fois à la fameuse question : « tu n’as pas eu peur de rentrer chez toi avec un tout petit bébé ? Moi j’ai pleuré parce que je devais quitter la maternité ! », et autre variante. Et bien non, non et non. D’abord, parce que j’ai accouché sainement en sentant qu’en face, on faisait confiance à mon pouvoir de donner la vie. Ensuite, parce que j’ai été mise directement face à mon instinct de mère et à ma capacité à gérer mon enfant. En gros, j’étais accompagnée, pas assistée ! L’état d’esprit dans lequel j’ai franchi la porte de ma maison, c’était dans la confiance, pas dans la peur. Et puis, à la fameuse question, j’ai toujours donné comme réponse : « quand ton enfant naît, tu prends pendant 3 à 5 jours tes marques à l’hôpital : le bain, les infirmières quand un truc bugge, les infirmières encore quand bébé ne dort pas et que t’es crevée, etc. Mais quand tu rentres chez toi, du haut de ton retour d’hormones, tu es complètement paumée. Moi, je suis rentrée tout de suite, je n’ai pas eu le temps de créer d’autres habitudes. La sage-femme fait le suivi pendant 1 semaine à la maison, elle vient pour faire les soins post-partum de la maman, mais aussi les soins du bébé : bain, oreilles, nez,  nombril, etc. Donc quand elle a fini à l’issue des 7-8 jours, tu es complètement à l’aise dans TES meubles. Et tu continues simplement comme les jours précédents, sans angoisser, parce que tu sais que tu sais le faire…


Source: Pinterest


Et ainsi deviens-tu Maman-capable-d’être-maman… !"


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